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Anarchie généralisée. 212 - 257

1. L'adhésion de la Bretagne à Posthume semble avoir été un fait naturel, compte tenu de la position géographique de notre île dans l'Empire. Il aurait été peu probable de toutes façons que Posthume laissât dans son dos un morceau de l'Empire fidèle à l'empereur de Rome. Mais à vrai dire, la Bretagne a été quasiment absente de ce débat, où la Gaule a joué un rôle essentiel. 

" ... Gaule, devenue la charnière du système défensif de l'Occident, avec la Bretagne comme annexe et l'Espagne comme soutien" (Ferdinand LOT. La Gaule. chap. 8). 

" Par sa position géographique, elle (la Gaule) était faite pour servir de lien entre ses deux voisines. Elle avait sur la Bretagne, plus pauvre et restée à moitié barbare, la supériorité de sa richesse, de sa civilisation. Sur l'Espagne, elle l'emportait par cette énergie que développent la lutte et le sentiment du danger. Il était naturel qu'elle les entraînât toutes les deux dans son orbite". (G. BLOCH).

L'empire gaulois.

2. En 262 et 265, selon F. Lot. La deuxième expédition contre Posthumus était confiée à Manius Acillius Aureolus, ... le plus réputé, le plus violent, et aussi le plus ambitieux ... (des généraux de Gallien). cf. Maurice Bouvier-Ajam. Empereurs gaulois. chap. VI.

3. Marcus Piavonius Victorinus était commandant d'un corps d'élite de l'armée d'Aureolus. Quant à Aureolus lui-même, il se fait proclamer empereur en Italie du Nord par ses troupes.

4. M. Bouvier-Ajam. Empereurs gaulois; chap. 6. F. Lot. La Gaule; chap. 8.

5. La question de la destruction de la ville d'Autun reste très controversée, tant à propos des dates qu'à propos des responsables de l'évènement. 

Pour M. Bouvier-Ajam, Empereurs gaulois, l'évènement se situe sous Tetricus (268-273); chap. 8 : "Tout ce qui est Eduen et non réfugié dans la place forte est tué, le siège formidable commence. Il durera sept mois, les troupes se relayant pour que les fronts de l'Est ne soient pas trop découverts. La famine, la peste, les entassements de morts. Quand la ville cède, elle n'est plus qu'un amas de ruines. Tetricus II n'a rien pu faire pour éviter cela". 

Par contre, Edouard Galletier, traducteur et commentateur du Panégyrique V, Discours d'Eumène pour la restauration des écoles d'Autun, affirme que Victorinus est bien l'instigateur et l'exécutant du siège de la ville d'Autun. Cf. introduction, chap. II, paragraphe 2 : "  ... Victorin punit la ville d'avoir répudié la dissidence. Après un siège de sept mois, Autun fut prise et saccagée par des troupes qu'Eumène qualifie de rebelles Bataves, mais où tous les éditeurs depuis Livineius, égaré lui-même par Juste Lipse, ont voulu par anticipation reconnaître les Bagaudes. A la lumière du monnayage des empereurs gaulois, on a démontré récemment cette vérité, entrevue déjà par Jullian, que ces princes étaient en relation avec les Bataves et comptaient des éléments bataves parmi leurs troupes d'élite de Germanie Inférieure. Ce ne sont donc pas, comme on le répète d'ordinaire, les troupes de Tetricus, grossies des bagaudes, qui ont en 269 - 270 ruiné Autun, mais c'est l'empereur Victorin avec son armée régulière partiellement formée de recrues bataves, où l'orateur officiel de 298 affecte de voir seulement des rebelles et barbares. Quoi qu'il en soit, la cité, dévastée et dépeuplée alors, ne se relèvera jamais complètement du coup qui lui avait été porté".

Ferdinand Lot semble avoir adhéré à cette dernière thèse.

6. Mêmes références que note 4 ci-dessus.

Retour dans le giron de Rome. Nouvelles menaces : les pirates Saxons.

7. Ordnance Survey. Map of Roman Britain. Chronological Table : 275 - 287, Saxon pirates in the Channel.

8. Stephen Scoffham. The Romans in East Kent.

Carausius et Allectus. Constance Chlore.

9. Aurelius Victor. Césars. 39.20 : " Dans cette guerre (contre les Bagaudes), Carausius, un Ménapien, se fait remarquer par des exploits fort brillants; pour cette raison, et aussi parce qu'il passait pour savoir diriger des navires (il avait exercé ce métier pour de l'argent dans sa jeunesse), on le chargea d'équiper une flotte et de pourchasser les Germains qui infestaient les mers". 

Selon Eutrope et Orose, ce sont des Francs et des Saxons qui infestent la mer. Eutrope précise que Carausius a eu pour tache la défense des côtes " ... per tractum Belgicae et Armoricae ...".

10. Aurelius Victor; 39-21 : " Enorgueilli à l'excès par cette élévation, il détruisit un grand nombre de Barbares sans verser au Trésor public tout son butin, et, redoutant Herculius, qui, il le savait, avait donné l'ordre de le mettre à mort, il prit le titre d'empereur et s'empara de la Bretagne". 

Ces accusations graves sont confirmées par Eutrope et Orose. L'évènement a également été largement commenté et exploité dans le Panégyrique IV, dit de Constance; IV.XII.I :  " Mais lors de ce criminel brigandage, le pirate commença par emmener dans sa fuite la flotte qui jadis protégeait les Gaules, puis on construisit une multitude de navires sur le modèle des nôtres, se rendit maître d'une légion romaine, cerna quelques détachements de soldats étrangers, rassembla et enrôla les commerçants gaulois, par l'espérance des dépouilles de ces provinces même s'assura de redoutables hordes de Barbares ...".

Plus récemment, Maurice Bouvier-Ajam a consacré le dixième chapitre de son ouvrage : Les Empereurs gaulois, à l'épopée de Carausius. Pour cet auteur, "Carausius est nécessairement apprécié des Britanniques et des Gaulois du nord-ouest continental".

11. Panégyrique 2, dit de Maximien, chap. XI / 7 : " C'est, je le répète, votre fortune, c'est votre bonheur, empereur, qui déjà a conduit vos soldats victorieux jusqu'à l'Océan, où déjà le va et vient des flots a absorbé le sang des ennemis qui ont été taillés en pièces sur ces rivages".

12. Les Panégyriques étant essentiellement des discours apologiques et élogieux, leurs auteurs ont cherché, par des tournures de langage et formules alambiquées, à habiller certaines vérités, voir à les travestir ou à en inverser le sens, de façon à caresser dans le sens du poil la gloire, la fierté, et l'orgueil des empereurs. Mais il n'en reste pas moins qu'une lecture objective, par des recoupements de textes émanant d'autres auteurs, permet de déceler le véritable sens des propos des panégyristesµ. C'est ainsi que l'on découvre, à la lecture du Panégyrique II, dit de Maximien, chap. XII / 4, la sécheresse qui a empêché la flotte romaine de prendre le large en cette année 288 : 

            "  Durant presque toute l'année, empereur, ou tu avais besoin du beau temps pour construire les navires, pour débiter les pièces de bois, pour soutenir le courage des travailleurs et prévenir tout engourdissement de leurs bras, il n'y eut pour ainsi dire pas un jour qui fût assombri par la pluie. L'hiver même affecta une douceur printanière. Il semblait que nous ne vivions plus sous le ciel du nord, mais par une sorte de mutation des astres ou des parties du globe nous éprouvions la clémence d'un ciel méridional. Ce fleuve qui arrose nos campagnes, longtemps privé de l'aliment des pluies, était incapable de porter nos navires, il ne charriait guère vers tes chantiers que des bois de construction."

En fait, il s'agit là d'une façon éloquente de faire savoir que les Romains auraient préféré avoir un peu plus de pluie cette année là, et un peu plus d'eau dans la Moselle, pour pouvoir mettre à exécution leur projet d'expédition en Ile de Bretagne.

13. Même référence que la précédente : 

            " Mais voici que soudain, au moment ou il fallait lancer les navires légers, la terre a, pour toi, fait sourdre des fontaines abondantes, Jupiter a, pour toi, fait tomber des pluies torrentielles, l'Océan a, pour toi, reflué dans le lit des fleuves sur toute leur longueur. Ainsi, les navires se sont élancés sur les eaux qui d'elles-mêmes se glissait sous eux, mis en branle par une légère impulsion des équipages qui, pour ces heureux débuts, n'avaient qu'à entonner le chant des bateliers plutôt qu'à déployer leurs efforts. Aussi, empereur, est-il aisé de comprendre quels heureux succès seront ton partage dans cette expédition maritime, puisque tu disposes ainsi désormais des faveurs de la température".

En fait, on voit bien à la lecture de ces textes que ce ne sont là en réalité que vœux pieux et politesses de langage, puisqu'il s'agit d'une reconnaissance implicite que la marine de Maximien n'a jamais atteint l'Ile de Bretagne, et que l'auteur est obligé de parler au futur, c'est à dire en hypothéquant sur des évènements non encore arrivés.

Mais la pire des hypocrisies se trouve chez Aurelius Victor (Césars, 39 / 39), puisque celui-ci masque la réalité des faits pour laisser croire que : "... à Carausius seul on laissa sa souveraineté sur la Bretagne ...", comme si c'était de bonne volonté, ou de gaieté de cœur, que Maximien tolérait la présence de l'empereur Carausius en Bretagne. Le recoupement des deux auteurs reflète l'aveu d'une situation humiliante pour Maximien et pour Rome. A quelque chose près, on a l'impression d'avoir à faire à la langue de bois pratiquée par les hommes politiques français d'aujourd'hui; comme quoi, la culture gauloise ... c'est culturellement français ! 

Le Panégyrique de Constance, par contre, est plus honnête, car il reconnaît (IV.XII.2) :

            " Il s'y était joint en effet une longue impunité du crime qui avait porté si haut l'audace de ces forcenés qu'ils se prévalurent de l'inclémence de la mer, qui avait ajourné notre victoire par une sorte de nécessité fatale, pour attribuer ce retard à la terreur de leur nom et qu'ils crurent non point que la prudence avait momentanément fait interrompre l'expédition, mais que le désespoir y avait fait renoncer ...".   

14. Panégyrique IV / VI, et Panégyrique VII / V / 2 et 3.

15. Panégyrique IV / VII / 3. L'auteur a bien du mal à dissimuler le fait que la flotte impériale a été mise à mal par la marée : " Tu aurais pu, invincible César, emporté par l'élan de ton courage et de ta fortune, achever la guerre tout d'une traite, si les nécessités des circonstances ne t'avaient conseillé de consacrer quelque temps à la construction d'une flotte".

16. Aurelius Victor. Césars. 39 / 40 et 41. Panégyrique IV / XII / 2.

17. Le déroulement des opérations est donné par le Panégyrique de Constance. IV / XIII, XIV, XV, XVI, XVII.

18. La victoire de Constance a été largement exploitée par son panégyriste, comme synonyme de liberté retrouvée pour les Bretons. 

IV / XVIII / 7 : " Quant à la Bretagne, qui avait pendant si longtemps offert asile au crime, il est certain qu'elle ne s'aperçut de votre victoire qu'en recouvrant la liberté". 

Idem, IV / XIX : " Donc aussitôt que tu eus abordé à ce rivage, comme un vengeur et un libérateur depuis longtemps souhaité, c'est avec raison qu'un cortège triomphal se répandit au-devant de ta majesté et que les Bretons sautant de joie se présentèrent à toi avec leurs femmes et leurs enfants ...

... Il n'est pas étonnant que leur allégeance fût si grande, après tant d'années de misérable captivité, après les violences faites à leurs femmes, après la servitude déshonorante de leurs enfants : enfin libres, enfin redevenus Romains, ils étaient enfin rendus à la vie par la véritable lumière de l'empire ...".

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