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Yann DRUILHENN

Yan DRUILLEN

Buhez-skrid Biographie
war ar stern en préparation

 

 

Les 600 mendiants de La Roche-Derrien

La mendicité était largement répandue mais nullement déshonorante : les plus pauvres trouvant auprès des possédants une aide précaire  dictée par la morale chrétienne. Des colonies de mendiants déambulant sur les routes avaient leurs quartiers dans les bas-fonds des petites villes, ainsi à La Roche-Derrien, près de Tréguier

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" La petite ville de La Roche-Derrien, près de Tréguier, a tout au plus 1600 âmes. Le tiers de la population se loge dans les quartiers bas, le long du Jaudy, un endroit malpropre, quoique ce soit aux bords d'une rivière. Ces cinq ou six cent habitants ont leur commerce entre eux, et ils entretiennent le moins possible de relations avec leurs concitoyens des hauts-lieux. Dans la vieille cité déchue, qui fut au moyen-âge une forteresse souvent assiégée par les anglais et qui reçut ensuite la visite des espagnols, il y a eu, de temps immémorial, comme deux populations distinctes : l'une, de mœurs sédentaires; l'autre, chaque jour poussée au-dehors. Suivant une désignation populaire, celle-ci ne serait autre qu'une colonie; les indigènes se seraient donc maintenus sur les hauteurs. La "colonie rochoise" se livre particulièrement à l'industrie des chiffons. Le pillaouer - et plus souvent, stouper, à La Roche - passe les trois quarts de son existence à battre la campagne, autour des fermes; il part au petit jour, et il ne rentre que le bissac plein, bourré de fumier ou de pommes de terre, si les chiffons lui ont fait défaut : ce fumier, ramassé sur la route, appartenait à tout le monde et au premier venu; mais ces pommes de terre ont été généralement tirées de quelque champ, sans l'avis du maître : d'où l'on conclut que le stouper ne jouit pas d'une réputation sans tache. S'il est pris en faute, il réplique qu' " il ne peut pas se résigner à mourir de faim". Au demeurant, courageux, serviable, redouté quelquefois, rarement détesté, prêtant au paysan volontiers de quoi rire sur son compte, parce qu'il s'attend bien  à trouver l'occasion de prendre sa revanche. 

Ces nomades ont une vie laborieuse. Il en est peu qui ne vivent que d'aumônes et qui se désintéressent de la lutte pour l'existence.

Ils sont sortis de la ville, dès le point du jour. Le stouper suit sa même route quotidienne, portant de la poterie, en hiver, des écuelles et des plats; l'été, ce sont des fruits, des cerises surtout : en échange il rapportera les étoupes, les chiffons ou la ferraille., tout ce qu'on aura mis de côté dans les maisons de ferme. Ses visites ne s'étendent pas au-delà d'une paroisse ou deux. Dans les bourgs on voit arriver chaque matin, et, le soir, repasser le même quémandeur. Comme il ramasse autant de nouvelles que de chiffons, en courant le pays, on le retient souvent, lorsqu'il est l'heure du repas; et, pour un peu de bouillie de blé noir, il "récite sa gazette".

Fier de sa ville et hautains dans ses murs, il devient humble à la campagne, et se montre doux, obséquieux t résigné devant la porte d'une ferme; si un paysan lui en fait la remarque, sa réponse st prête : 

" Pelloc'h eer gand ann tog ewit gant ar vaz. On va plus loin avec le chapeau ( à la main) qu'avec le bâton".

Voilà un dicton qui n'a jamais eu le droit de cité à La Roche. Et qu'on lui demande encore : 

"Ped stouper deuz ar Roc'h lakfer da ober runn den onest ?" Combien de chiffonniers de La Roche mettrait-on pour faire un honnête homme ?".

Il fera cet aveu : " Eur c'hant evel-d-hon, me chans, hag unan evel-out-he. Une centaine comme moi, sans doute, et un seul comme toi-même".

Mais à La Roche, il aurait vite, comme on dit, changé de rôle : 

" Un seul comme moi, répliquerait-il, et cent de ton espèce".

... 

Narcisse QUELLIEN. L'argot des nomades en basse Bretagne. 1886

Sonjoù JC Even evit hen e-unan : 

Dalc'het mat am eus sonj hag ma Mamm-gozh a oa ganti ur ger ispisial, hag evidon-me a oa ur ger diavez, evit komz eus un den bennak gantan a seblant fall, kenkouls war ar pezh a zelle e zilhad, eget ar pezh a zelle hag ne oa ket prop tamm ebet warnan; koulz lavarout ur sac'h laou. 

Ar ger se a oa tost da : 

andruilhen

 er stummoù da gomz kement-man : 

- heman n'eo ket nemet un andruilhen, (heman n'eo ket nemet ur sac'h laou)

- tec'h alese eta, andruilhen ... (mont kuit diouzh aman diouzhtu, sac'h laou ...)

War ar seblant eo sklaer hag an anv-se, hag a oa kustumm eviti, a oa e gwirionez tennet hag stummet, hep a oa ret gouzout diouzh pelec'h, diouzh anv ar muian brudet diouzh ar sec'hier-laou Kêr ar Roc'h : 

Yann Drulhen

 Tu a zo da sonjal hag a oa aeset da dostaat an anv-se gant hini an anduilhen, hag a servij c'hoaz hirié evit ober dismegans.

Ha koulskoude, tu a zo ganin da douin war Ene ma Mamm-gozh, m'az hi d'eus lakaet ur wech-bennak ur c'hlasker-bara er maez eus hi di, sur a-walc'h hag a oa bet heman re-bell ganti ... ha dreist-holl a lavare ar memes-tra diwar hi paotred dezhi hi-unan (ma zontoned war kostez ma mamm !), hag ne oant ket ordinal re brop kennebeut,

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M'az a zo un Aotroù Doue evit pilhouerien hag klaskerien-bara Kêr-ar-Roc'h, ra vezo d'ezhan bezan karantezus ha gwarezus ganto.

Commentaires personnels de JC Even : 

J'ai très nettement le souvenir que ma grand-mère utilisait un mot particulier, qui pour moi était d'origine inconnue, pour désigner une personne très mal tenue, aussi bien du point de vue vestimentaire que du point de vue propreté, voir même un pouilleux. 

Ce mot se prononçait approximativement comme suit :  

andrulhien

dans des expressions comme : 

- heman n'eo ket nemet un andruilhen,  (celui-ci n'est qu'un pouilleux)

- tec'h alese eta, andruilhen ... (veux tu foutre le camp de là, pouilleux ...).

Il me semble clair que ce nom, qui était commun pour elle, était en fait tiré et adapté, sans forcément en savoir l'origine, du nom du plus célèbre des pouilleux de La Roche : 

Yan Druilhen.

On peut penser que le rapprochement était facile à établir avec le mot andouille / anduilhenn, utilisé, même encore aujourd'hui, en forme péjorative. 

Et pourtant, je puis jurer sur la Mémoire de ma grand-mère que, s'il lui est arrivé de mettre un jour un mendiant à la porte, c'est que vraiment celui-ci avait du exagérer ...  et ceci d'autant qu'elle le disait aussi à propos de ses propres fils (mes oncles maternels !), qui n'étaient pas toujours très nets non plus. 

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S'il y a un dieu pour les chiffonniers et les mendiants de la Roche : qu'il les aime et les protège.

 

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